"Freedom Fighter"
(identité dissimulée pour éviter des problèmes à ses amis tibétains)
,
de retour en Europe depuis 4 mois,
témoigne de ses 2 ans passés au Tibet


Avril 1998 (1er texte)

A Chantal Mauduit et au Tibet libre.

 

 

Le Potala, à Lhassa

 

  • Lha veut dire Dieu. Sa veut dire terre, lieu.

    Aujourd’hui la capitale du Tibet, Lhasa, la Terre des Dieux est devenue la Terre des Putes. Le plus grand bordel du monde par rapport à la population.

    A Bangkok, il y a des rues sans pute. Pas à Lhassa.

    Jospin a dit : «Je préfère m'arrêter aux signes porteurs d'espoirs… mentionnant notamment…. la Chine qui a signé le pactes des nations désunis sur les droits économiques, sociaux et culturels et qui signera "demain" celui des droits civils et politiques ».

    Quand je lis cela mon cœur bat à 180 battements minutes.

    M. Jospin, je n’appelle pas un bordel un centre culturel. Les prostituées chinoises sont subventionnées par le gouvernement chinois pour venir au Tibet (transport gratuit ou peu onéreux).

     

    Les premiers cas de séropositivité ont été détectés en octobre 1997. Le HIV est au Tibet. Les Tibétains n’utilisent pas de capote. Il y a 2 ans on enseignait à l’école de médecine tibétaine que le SIDA venait des étrangers. Le fléau n’est pas connu là haut, l’information n’est pas passée.

     

    Le long du Lingkor, le chemin sacré qui entourait la ville , a été organisé par le gouvernement le broyage de centaines de vidéos porno par un bulldozer. Or, cette cérémonie était organisée dans la rue (le Lingkor ayant disparu) où se trouve le plus grand nombre de bordel. Quelle hypocrisie…

    Le gouvernement laisse les prostituées chinoises contaminer les Tibétains et les militaires chinois. Les vidéos ont réapparu. J’en ai vu à Lhassa. On appelle cela des blues movies (des films bleus).

     

    Les « molas » , les grand-mères, longent les bordels tôt le matin quand les prostituées dorment. Elles les longent aussi la journée quand les prostituées tricotent. Sans comprendre, elles marchent et se prosternent devant le Potala.

    Devant le Potala, il y a la plus grande discothèque de Lhassa avec des madonas chinoises et des perruques vertes à moitié à poil (les madonas, pas les perruques). Les discothèques sont remplies de chinois et de quelques stupides touristes et stupides membres d’organisations non gouvernementales. Dans l’ancienne rue qui va au Holliday Inn, qui a dû fermer à cause d’une menace de boycott, il y a le bowling et une autre discothèque où dansent des travestis chinois. Elles sont mignonnes…

     

    Dans 10 ans, 40 % des tibétains contaminés mourront du SIDA. Si vous allez à Lhassa, apportez des capotes. Dans 20 ans, 1 million de Tibétains seront morts du SIDA. J’espère me tromper.

     

    J’ai gagné un concours de danse dans une discothèque de Lhassa. J’étais le meilleur danseur, le plus con peut-être aussi. Dans cette boîte, il y a un nain. Il s’appelle Z..., il a 17 ans. Il effectue des danses sexy en souriant sur les planches. Il y avait un soir un australien; en Australie, on lance les nains. Je lui ai lancé Z... dans les bras. Depuis Z... est mon ami. Si vous voulez l’aider à étudier, à ne plus se prostituer dans une boîte de nuit de Lhassa, contactez-moi. Si vous voulez aider… au Tibet, pas en Inde.

     

    En 1996, les Chinois ont organisé une course de fond (un jogging) pour les moines du Potala. Ils partaient du bas du Potala et devaient grimper jusqu’au sommet en courant. Le premier prix était une thermos. Quand je vois la pub pour Xantia (citroën), je pense «ils utilisent un musée - prison et des prisonniers pour vendre leur voiture ».

     

    Les Tibétains qui visitent le Potala (où il y a des caméras partout) vont dans un sens. Dans le sens de la visite. Les Chinois et autres touristes visitent dans un autre sens. Pour emmerder les Tibétains, pour leur montrer le peu de respect qu’ils ont pour le Tibet. A l’entrée de chaque monastère aux alentours de Lhassa, à Shigatsé, à Gyantsé, il y a une plaque qui rappelle que les monastères sont des unités de travail comme les autres. Donc ils ne peuvent pas prier le dimanche.

    Quand on roule la nuit, qu’on croise une voiture, on met les pleins phares. C’est une tradition chinoise pour emmerder le monde.

    Devant le Jokhang, le temple le plus sacré, il y avait une grande banderole en juin 1997 pour souhaiter un bon retour dans la mère patrie à Hongkong.

     

    Ne me traitez pas de raciste, car j’ai manifesté après minuit le 1er juillet à Hongkong. En Chine, avec des chinois, pour le Tibet, pour la liberté, pour la Chine.

     

    Les Lamas ne peuvent plus donner d’enseignements. Il y a de la rééducation politique dans tous les monastères depuis 3 ans. Dans chaque ville importante du Tibet, il y a un chargé des affaires religieuses. Tout est contrôlé par les Chinois.

    Au Tibet, pendant que M. Chirac dit que les droits de l’homme sont universels, mais qu’ils peuvent s’interpréter de différentes manières selon les cultures, des femmes sont empalées vivantes dans les prisons. Oui, vous lisez bien : un bâton dans l’anus. Si elles mentent au cours de l’interrogatoire : on l’enfonce.

    Dessin de torture

     

    Les Chinois ont mis des matraques électriques dans le vagin des nonnes, couper des mamelons…

    Il y a un musée des droits de l’homme au Tibet. Je sais où il se situe. Les Chinois ont tué des gens en Chine sans les toucher. Ils les mettent sous une cloche et font sonner. Après une semaine, tous les os sont brisés : c’est la mort.

     

    Le Tibet est un bordel, une immense prison, une immense caserne. Les Chinois arrivent la nuit. Ils représentent 80 % de la population du Tibet historique, le vrai Tibet, le grand Tibet. Celui qui est grand comme l’Europe occidentale. Tout Lhassa est entouré de prisons. Les canons sont pointés en direction de la ville. Du haut des montagnes qui surplombent Lhassa on peut les apercevoir.

    Les Chinois disent qu’ils représentent 10 % de la population du Tibet.

    La première chose que l’on voit quand on arrive à Lhassa, c’est une caserne. Avant d’apercevoir le Potala, on voit une caserne avec des châteaux d’eau bleus et blancs.

    Au Tibet, on prononce les sentences en public. Des gyrophares, des sirènes suivent le cortège de camions avec des prisonniers et des militaires qui font une démonstration de leur force en fixant les passants de chaque côté de la rue, la mitraillette pointée sur la foule, le fusil bien droit. Ils effectuent le tour de la ville, j’ai des photos.

     

    Les exécutions sont publiques aussi. Elles ont lieu à la sortie de Lhassa dans un enclos, deux virages avant le Bouddha sculpté dans la pierre sur la route de l’aéroport dans le flanc de la colline. L’été les touristes s’arrêtent et prennent en photo le Bouddha sans se douter ce qu’il se passe à 500 mètres.

    Dessin exécution publique

     

    Les touristes à Lhassa, il y en a beaucoup. L’été 50 % d’entre eux sont cons. Certains s’habillent mal et ils ne comprennent rien. D’autres savent lire derrière les sourires des Tibétains et les grimaces des Chinois. Ils grimacent car entre autre, ils ne sont pas très heureux d’être loin de leur pays .

    Qu’ils y retournent dans la paix !

    Au Tibet, les parents n’osent plus parler à leurs propres enfants de certaines choses. Tout le monde se méfie de tout le monde. Il y a des espions partout. Les manifs durent une minute seulement. La ville est quadrillée. Il y a des caméras sur les toits qui surveillent. Allez voir vous même et apportez des capotes. Apportez aussi des photos du Dalaï Lama, je sais à qui les donner.

    Les enfants doivent porter des survêtements à l’école. Bleu et Blanc : les couleurs de l’équipe de foot de Marseille.

    Il y a quelques peugeot 504 : des voitures de flics.

    Sur l’île de Lhassa (car Lhassa est près d’un fleuve) les Chinois de Macao vont ouvrir un casino, et d’autres bordels.

    Au Tibet, on stérilise de force les femmes. J’en ai la preuve. Un « village doctor » touche 24 FF par mois. Par contre, il faut un minimum de 750 FF pour mettre un pied à l’hôpital : « le city hospital ». Les paysans le savent, restent chez eux, meurent, car ils n’ont pas cette somme.

      

  • Je connais un peu le Tibet.

    Un peu car je ne parle pas couramment leur langue. Alexandra David Néel dit qu’il faut avoir passé 10 ans dans un pays autre que le sien pour en parler. Qu’elle me pardonne. A l’époque où elle y était, les écoliers n’étaient pas obligés d’écrire des rédactions contre le Dalaï Lama et d’apprendre le chinois. Aujourd’hui, si un Tibétain ne parle pas chinois à Lhassa il peut difficilement trouver du travail, 50 % des jeunes sont au chômage. Heureusement, les Chinois ont tout prévu pour les occuper : disco, cigarettes pas chères, alcool subventionné… En plus au pays de l’oxygène rare, les clopes durent plus longtemps : 15 minutes contre 5 en France. Si vous voulez faire des économies de clopes, allez fumer au Tibet et amenez des capotes.

    Une responsable de l’agence de voyage « Nouvelles Frontières » m’a dit : « on n’a pas besoin d’accompagnateurs comme toi qui savent ce qui se passe là-bas ». Ils préfèrent envoyer des bœufs humains qui passent et ne comprennent rien. Comme les himalayistes qui grimpent des 8000 m pendant que des sherpas , dans l’indifférence, pour les aider à monter, tombent et meurent.

    Je veux bien que l'on dépense des sommes astronomiques pour gravir des sommets à conditions que l'on aide aussi le peuple tibétain. Le Dalaï Lama n'encourage pas l'hymalayisme. Tous les sommets sont sacrés.

    On ne peut pas aller au Tibet comme on va à la mer Méditerranée.

    J’ai un ami qui escalade des 8000 m mais qui regarde aussi les vallées qui précèdent ces 8000 m. Il amène ses amis avec lui pour partager . Même si certaines montagnes ne lui offrent pas le plaisir de les caresser au sommet, il les respecte et surtout respecte les Tibétains. Le guide du routard a une section droits de l’homme au début de chaque ouvrage. Eux ils ont compris. Pas les touristes qui arpentent le Jokhang en short. Heureusement , je fais partie de la police de Lhassa, je veille. Les Tibétains avouent que c’est un manque de respect de porter un short à Lhassa. Ecoutez les et partez. Partez et emmenez les Chinois avec vous. Revenez quand vous aurez compris. Et quand vous reviendrez, allez tourner autour du Kalash avec M.Y. Il vit là-bas, il connaît le Kalash. Il vous accompagnera , moi aussi d’ailleurs.

      

     
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2ème texte (qui reprend des informations du 1er texte)

A tous les adhérents, sympathisants, partisans, paysans.

 

  • Le Tibet est une prison.

    Le Tibet historique a une superficie de 3 500 000 kms ² (7 fois la France)

    Une prison de la taille de l’Europe occidentale ! !

    6 millions de prisonniers. Essayons de les libérer.

     

    Je m’appelle « Freedom Fighter », je viens de passer 2 ans au Tibet. Je suis arrivé fin 1995.

    Je vais vous parler de ce que j’ai vécu , c’est un devoir pour moi.

    Je souhaite commencer en pensant quelques instants à tous les prisonniers chinois. Ils sont 3 fois plus nombreux que les Tibétains. La Chine est une prison. Une prison pour les âmes.

     

    Je vais décrire les atteintes aux droit de l’homme et de la femme :

    Au niveau santé, rééducation du clergé, des loisirs, de la culture en général, architecture.

     

    Tout ce que vous lisez est vrai. J’en ai les preuves.

    Il n'y a aucune éthique médicale au Tibet. Les chirurgiens s'entraînent parfois sur des Tibétains.

    Si un Tibétain n’a pas d’argent et qu’il tombe malade, il est mal barré.

    Et comme les Tibétains sont pauvres, la situation est difficile.

    Il y a 4 hôpitaux à Lhassa :

    Le City hospital : caution de 750 F pour les hospitalisations.

    Le Regional hospital : caution de 1500 F

    L’hôpital des maladies infectieuses : 2250 F de caution.

    Et un hôpital de médecine tibétaine ; je ne connais pas le prix.

     

    Un docteur village touche 24 F par mois.

    Pas de caution = pas d’hospitalisation = mort parfois.

    Les gens le savent et ne se déplacent même plus. Ils savent qu’ils seront refoulés. Ils meurent. A 10 ans, 20, 30 ,60 ans. L’espérance de vie est à mon avis de 54 ans. Les femmes de la campagne accouchent sur la paille , seules, près des animaux. Pas d’accoucheuse traditionnelle. La mortalité est importante (infantile comme maternelle).

    Il y a des campagnes de stérilisations forcées ou conseillées.

    Des femmes racontent que dans le village régnait une odeur fétide de fœtus jetés dans les toilettes. Si elles ne venaient pas, on emprisonnait leur mari.

     

    Les 2 seules opérations auxquelles il m’a été donné d’assister dans l’hôpital où j'ai pu rentrer sont des opérations de la cataracte pour les vieux et la stérilisation pour les femmes. Elles n’étaient peut être plus complètement forcées, comme avant mais certainement conseillées, proposées.

    Le médecin tibétain que je connaissais n’a pu venir à une fête que j'organisais car il était en campagne de stérilisation à Shubu dans le comté de Nimu à 150 km à l’ouest de Lhassa en novembre 1997.

    Une infirmière tibétaine avec qui je souhaitais sortir boire un verre m’a répondu qu’elle partait un mois à Nakchu (à 120 km au Nord de Lhassa) pour une campagne de stérilisation accompagnée de 4 médecins du «Regional hospital de Lhassa ».

     

    Toutes les méthodes contraceptives sont disponibles. Il y a 80 millions de stérilets dans le monde,60 millions en Chine.

     

    La femme d'un médecin de Village a un implant sous-cutané au niveau du bras. Elle vit en pleine montagne. C’est une opération faite sous une stricte asepsie en Europe. Au Tibet c’est sous une tente pendant une campagne de promotion. Une dizaine de femmes ont cet implant dans ce village. Dans chaque village il y a une « women federation » qui contrôle , réprime, mais ne fait pas de promotion en faveur de la vie, ou si peu. Jamais je n’ai vu un tel déploiement de méthodes contraceptives au monde. Les femmes ont le droit d’avoir 3 enfants dans les campagnes, 2 à Lhassa et 1 si elles travaillent pour le gouvernement. Elles doivent donner le bon exemple. Si elles dérogent à la règle : amende de 400 francs. Les enfants en sus ne sont pas enregistrés et ne peuvent obtenir aucun poste de fonctionnaire.

    La vaccination marche assez bien, surtout la chaîne du froid. Inutile de monter au-dessus de 4000 mètres : l’ombre et le froid sont efficaces.

    Si je vous raconte tout cela, c’est parce qu’avant ce n’était pas mieux où même pire, mais qu’aujourd’hui des délégations étrangères visitent le Tibet, et on leur vante le système de santé chinois mis en place pour aider les barbares, incultes, pauvres, soumis, anciens esclaves tibétains.

    On dit à ces délégations que l’hôpital est gratuit. La différence est que la situation était acceptée avant et qu’aujourd’hui elle est imposée. Je ne crois plus les Chinois .

    Aujourd’hui encore, on brûle des offrandes au Tibet pour que la fumée chasse les mauvais esprits. On consulte un Lama qui priera pendant 2 heures pour soigner un abcès dentaire. Rarement l’amji (le docteur) sera appelé dans la maison où un enfant malade souffre, de peur qu’il amène avec lui des mauvais esprits… l’enfant guérira seul ou ne guérira pas.

     

    Les prostituées sont légions à Lhassa., elles sont regroupées dans un premier temps à Chengdu puis envoyées contaminer les soldats chinois et le tibétains. Elles sont subventionnées par le gouvernement . On les aide à venir au Tibet (transport gratuit ou peu onéreux). Une enquête faite sur place montre leur grande ignorance face au HIV. Elles racontaient début 1997 ne pas être au courant de l’existence du virus, ou ne pas être en mesure d’imposer les préservatifs à leurs clients. Certaines pensent que le HIV vient des étrangers. C'est ce qu'on enseigne toujours à l'école de médecine… Les premiers cas de séropositivité sont apparus en 93 selon un médecin, en 1997 selon mes sources. En octobre 1997 pour être plus précis.

    Je pense que le 1er problème du Tibet aujourd’hui c’est les Chinois, puis les hépatites et le HIV. C’est pareil.

     

     

    En ce qui concerne l’éducation, je ne suis pas le mieux placé pour en parler mais je sais :

    Que les enfants ne peuvent plus porter d’habits tibétains à l’école.

    Que le chinois est la première langue en primaire, la seule dans le secondaire.

    Que les enfants ont des survêtements uniformes à Lhassa.

    Que les professeurs reçoivent entre 3 et 6 mois de formation contrôlée, tout est contrôlé.

    Que les écoliers doivent composer des rédactions contre le Dalaï Lama.

    Qu’ils paradent dans la cour de récréation et dans les rues avec des drapeaux, des drapeaux rouges.

    Qu’ils doivent amener leur chaise, leur table, réparer les carreaux des vitres des salles de classes s’ils sont cassés.

    S’ils n’ont pas la carte d’identité de Lhassa, ils ne peuvent pas s’inscrire dans les collèges. A moins de payer, payer, payer… L’argent est roi, la corruption fait rage.

    C’est un véritable génocide culturel. Tout ce qui a trait à la culture est sinisé . Regardez autour de vous, dans votre pièce, dans la rue, tout ce qui pour vous évoque la culture, votre sentiment d’appartenir au peuple français ou anglais ou je ne sais quoi et dites-vous qu’au Tibet c’est sinisé sournoisement comme vous verrez plus tard.

    Les téléphones mobiles ont remplacé les prières. Les Harley Davidson version chinoise (sous licence américaine) ont chassé les chevaux, les mitraillettes en plastique les frondes pour diriger les troupeaux.

    Le Tibet meurt dans l’indifférence. Depuis 1995 la situation est pire encore. On est revenu à une atmosphère de révolution culturelle. La délation…

    Les jeunes écoliers dessinent d’un trait averti la calligraphie chinoise le soir à la maison. Ils savent que de leur connaissance de la langue de Mao et de leur application à reproduire les milliers de signes chinois dépend leur avenir dans le Tibet chinois. Des centaines de jeunes Tibétains sont ainsi envoyés, chaque année, se former en Chine pendant des années à la médecine, la littérature, les langues pour les stupides touristes. Ils reviennent avec un œil, une oreille sinisée. Ils ne peuvent plus écrire le tibétain , s’exprime mieux en chinois. Qu’est ce qui représente le plus une culture que sa langue ?

    Je me suis surpris à compter en chinois à la fin de mon séjour. C’est la première langue qui sortait de mon inconscient jauni. Excusez moi de ne pas avoir témoigné plus tôt. Nous sommes pris dans le flot. Nous préférons aller au bowling ou en discothèque plutôt qu’écouter les vieux nous chanter l’histoire ancienne de leur contrée meurtrie.

     

  • Le clergé, les monastères et les temples.

    Un Lama a demandé à un jeune moine ce que représente pour lui la fonction de moine au Tibet. Il n'a pas pu répondre car l’habit ne fait pas le moine. On raconte que certains ont des pistolets, certainement des téléphones portables. Un tibétologue, théologien a dit : « leTashilumpo, le monastère du Panchen Lama, est vide de sens ».

    J’ai arpenté pour la première fois les escaliers et les couloirs ombrés du Potala pour aider un moine qui souffrait d’épistasie. Il saignait du nez car les Chinois avaient organisé une course du bas du Potala au sommet. Le premier gagnait un thermos. Mon "patient" n’avait terminé que 3ème. Il a gagné une consultation en échange d’une entrée gratuite au Potala.

     

    Le parti communiste athé jusqu’à la moelle après avoir emprisonné Nyma, le vrai Panchen Lama, un enfant de 6 ans, a transformé tous les monastères en unités de travail. Chaque établissement est donc surmonté d’un terrible drapeau rouge sang qui marque, menace, intimide, rabaisse les moines et les nonnes du Tibet. On entre dans ces lieux sacrés en passant près d’une plaque dorée qui explique certainement que l’on pénètre dans tel ou telle unité de travail , et qu’on doit cesser de prier le dimanche, qu’ils doivent planter des arbres comme tout le monde, faire de l’exercice, payer des taxes et obéir au parti. Sur 100 moines, 50 sont espions, 30 des enfants sans aucune connaissance et 20 sont des vieux résistants…

    Lorsque Y. et moi-même allions admirer 2 fois par semaine le lever du soleil sur le Potala du monastère de Sera notre esprit était envahi par la propagande et la musique chinoise qui braille chaque matin les mensonges du parti. Quel réveil pour la cité des Dieux.

    Ils nous ont volé notre silence.

    Même dans les villages les plus reculés les hauts parleurs braillent.

    Silence on rééduque ! ! ou plutôt, on hurle encore plus fort que les cris de douleur des nonnes torturées à quelques mètres.

    Nous avons dormi à quelques centaines de mètres de la plus grande prison du Tibet.

    On a creusé dans la montagne la dernière demeure de certains prisonniers. Car on y échappe pas : Il n’y a qu’une sortie. On peut exécuter sans témoin. Les cris se perdent dans les profondeurs du sol, de la montagne.

    Cette terre sacrée qui doit rester inviolée pour les Tibétains.

     

     

    Vue aérienne de la prison de Drapchi

     

    Nous avons dormi près de Drapchi. La prison de Lhassa... Elle existait déjà au temps ou les Hans ne noyaient pas Lhassa. Pardonnez moi de ne pas avoir voulu entendre les cris, les souffrances du Tibet.

     Ils nous ont aussi volé notre ciel bleu à Lhassa. Depuis 1997, il est pollué.

     

    4 mois après avoir quitté le Tibet j’ai réalisé que je sortais de l’enfer, toute ma vie je me battrai pour le Tibet, je n’abandonnerai jamais, jamais.

    Au Tibet, il y a 20 missionnaires. Ils sont américains. Il y a aussi une danoise. Ils traduisent la bible en tibétain. Ils enseignent l’anglais à travers la bible. L’un de leur dossier dit : « and now it is time for Tibet » (et maintenant c’est le tour du Tibet…) Ils sont les vrais patrons du Puntock hotel devant le snowland hotel. Ils ne vont jamais au Jokhang. Ils font des bébés. Ils se multiplient à Lhassa. Ils enseignent l’anglais à l’université de Lhassa. Ils jouent de la guitare à Noël et à Pâques à la gloire de Dieu et de Jésus. 2 enfants, fils de missionnaires ont vu une tanka d’un bouddha. Ils sont partis en courant en disant « c’est le diable ».

     En 2001, tout le vieux village de Lhassa aura disparu. Ils rasent tout. Lhassa est une grande ville chinoise.

    Le Tibet est une immense prison grande comme l’Europe occidentale. C’est à mon avis, et cet avis est partagé par des Tibétains, une poudrière. Les gens n’en peuvent plus ; ils sont au bord du soulèvement. Je vous rappelle qu’il y a déjà eu 1 200 000 morts. Même à des niveaux élevés de responsabilités au sein du gouvernement tibétain de la région « autonome du Tibet », les gens en ont marre. Mais ils doivent « collaborer » pour rester en vie.

     

  • PLA= people liberation army

    L’armée populaire de libération. Une libération qui a coûté la vie à 1 200 000 tibétains . On s’en passe d’une pareille libération .

    Tous les noms des rues de Lhassa ont étés sinisés. Je suis passé à Eastern Liberation Road. La route de la libération de l’Est.

    Il y avait une route qui s’appelait route de la joie(happy road). Elle s’appelle aujourd’hui route de Pékin.

     Lhassa c’est un grand karaoké chinois, avec des vidéos chaudes!!!!!

     Imaginez le Vercors ou l'Auvergne sans arbre : la déforestation de l'Est du Tibet est massive.

    On ne parlera plus tibétain dans 15 ans à Lhassa. L'écrit a pratiquement disparu. Il faudra chercher pour trouver un Tibétain.

    Pendant le grand bon en arrière de Mao, la famine faisait rage. Les prisonniers infectés par des vers étaient atteints de diarrhée: ils nettoyaient les vers et les mangeaient.

     

     

    L'université est contrôlée.

    La télé et contrôlée.

    Les belles nomades de l'Amdo sont forcées de chanter en chinois.

    On mélange, on divise, on sème le trouble, on abrutit, on sinise.

    Les moines prisonniers doivent chanter l'hymne chinois chaque semaine pendant la montée du drapeau rouge sang...

    Ils se révoltent, on les tue.

    Les touristes ne voient rien.

    Un drapeau tibétain au Tibet = au moins 12 ans de prison.

    Je n'ai pas pu sortir de prison, pardon du Tibet , à cause d'une tempête de neige.

    Un mois plus tard j'apprenais que pendant cette tempête, six tibétains âgés de trois à seize ans avaient péri morts de froid à 5600 m d'altitude. Au Nangpa la, à la frontières tibéto -népalaise.

    Leur parents savaient qu'ils avaient peu de chance de les retrouver une fois au Népal ou en Inde.

    Ils ne les retrouveront jamais. Ils espéraient que leurs enfants recevraient une éducation tibétaine derrière l’Himalaya. C'est loupé.

    Les survivants de cette tragédie ont été amputés.

    Soixante dix guides touristiques tibétains ont été expulsés de leur agence de tourisme du jour au lendemain.

    A la place les Chinois mettent des guides chinois.

    97% des Tibétains en ont ras le bol.

    Cela fait quatre mois que je suis rentré et je m’aperçois à quel point les gens ne savent pas ce qu'il se passe vraiment là haut.

    Même à des niveaux élevés de responsabilité au sein du gouvernement tibétain de la région "autonome" du Tibet les gens en ont marre. Mais ils doivent collaborer pour rester en vie.

    Pendant deux ans et demi je n’ai vu que destruction du vieux Lhassa. Les chinois remplacent les vieilles maisons tibétaines par d’horribles immeubles avec sanitaires et points d’eau tout aussi déplorables.

    La spéculation immobilière bat son plein.

     

     

ON NE SAVAIT PAS !!!!!!

Vous voulez du sang ???

Vous en aurez.

Si la non violence n'est pas écoutée, la violence se fera entendre.

En France, en Belgique, en Suisse... il y a la paix.

Que l'on arrête de se plaindre!!!!

 

 

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3ème texte (écrit en novembre 1995)

Pauvres putes
Pauvres femmes
Pauvres enfants

  • Pauvres putes : chaque jour, je pense qu’une femme est contaminée par le HIV à Lhassa. Cela se passe presque sous nos yeux. En effet, nous nous promenons sur un parcours (Lingkor), chemin sacré pour les Tibétains mais où existent des dizaines de bordels. Le gouvernement chinois prend petit à petit conscience de l’ampleur du fléau après avoir longtemps nié.

    C’est déjà trop tard. Des dizaines de jeunes femmes débarquent à Lhassa chaque mois pour tricoter (les putes tricotent l’après-midi et « sell their vagina » comme dit Nima notre interprète).

    Essayons de faire quelque chose.

  • Pauvre femmes du tiers monde qui ne sont pas aller à l’école, qui sont engrossées, qui n’ont pas le droit ni même l’envie de se révolter.

    Pauvre enfants : interdit d’aller à l’école s’ils ne sont pas nés à Lhassa. Certains deviennent vagabonds. Ils n’existait pas d’enfants des rues, il y a 3 ans à Lhassa.

    Et si le Tibet n’était plus éternel ?

    Tibeternel.

     

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